lundi 23 juin 2014

De l'absolue nécessité d'Entreprendre

Dans un monde en mouvement, celui qui reste immobile recule.

Dans un monde en effervescence, celui qui se contente de suivre le rythme perd du terrain.

La métaphore du peloton cycliste permet d’illustrer ce phénomène.

Dans une compétition cycliste, le cycliste peu expérimenté qui se trouve en tête ou au sein du groupe de tête du peloton, et qui cherche trop à s’économiser, ou encore qui ne possède pas les ressources nécessaires pour accélérer et se relancer, et se contente d’aligner son rythme sur le concurrent le plus proche de lui, se retrouve rapidement en queue de peloton, puis se fait lâcher irrémédiablement.

Que s’est-il passé ? Comment peux-t-on être distancé en roulant à la même vitesse que les autres ?
C’est le résultat de l’effervescence.
En réalité, insensiblement mais régulièrement un coureur prend l’initiative d’accélérer sur quelques dizaines de mètres pour se replacer en meilleure position au sein du peloton. Notre cycliste du groupe de tête, se fait doubler par un autre concurrent mais n’y prend pas garde, calquant son rythme sur ses voisins immédiats et croyant rouler à l’allure moyenne du peloton. De temps à autre il est ainsi doublé. Quand l’un des concurrents sur lesquels il calque son rythme décide à son tour de se replacer plus en amont du peloton, instinctivement notre coureur reporte son attention sur ses autres voisins immédiats, dont certains l’accompagnent depuis un moment, qu’il est habitué à voir à ses côtés et qui lui paraissent donc familiers, et dont d’autres sont revenus de l’arrière à la suite d’accélérations individuelles. Ainsi, progressivement notre cycliste recule de place en place dans le peloton, pour assez rapidement se retrouver en queue. La tête du peloton se situe maintenant 200 mètres en avant, et l’allure est rapide. Se rendant compte de sa situation, notre coureur s’accroche aux roues de son prédécesseur immédiat, jusqu’à ce que ce dernier se relance à son tour pour se replacer. Un espace s’est alors libéré entre notre coureur et le peloton, celui-ci n’est plus au contact, il est lâché. Etant lâché, il lui serait encore plus difficile de revenir sur le peloton que de s’y être préalablement maintenu.

La vitesse perçue de progression des acteurs de l’environnement de ce coureur est inférieure à leur vitesse réelle parce que :
Ø  sa vision est trop partielle, dans l’espace et dans le temps,
Ø  il ne se compare qu’à ce qui le rassure et ne se remet pas suffisamment en cause,
Ø  il néglige des événements et des signaux, son niveau de veille est insuffisant,
Ø  il se situe dans une logique de suiveur et ne prend pas d’initiative pour doubler ses concurrents et se relancer.

L’effervescence caractérise notre environnement économique : création permanente de nouvelles entreprises, de nouvelles offres, apparition de nouveaux concurrents venus d’autres secteurs ou d’autres contrées, évolutions technologiques rapides, par à-coups, fusions - acquisitions, transformations des marchés, évolutions du comportement des clients, évolutions des rapports de force, évolutions des normes et réglementations, ...
Se remettre en cause, se ‘relancer’, rester entrepreneur, fait partie intégrante de la mission du manager, dont l’un des principaux rôles est d’assurer la compétitivité.

samedi 31 mai 2014

De l'importance de percevoir son environnement

Un réflexe inné quand la survie est en jeu ...

Tous les organismes vivants, du plus simple au plus complexe, sont dotés de moyens de perception de leur environnement (sensibilité à la lumière, à la température, sensibilité aux vibrations, à certaines substances chimiques, toucher, vue, odorat, ouïe, goût,...). 
Ces moyens de perception sont essentiellement focalisés sur les informations nécessaires à la mise en œuvre des comportements adaptés à la survie : perception des menaces externes, localisation des sources de nourriture, comportement reproductif. Ils induisent, chez les animaux grégaires, des échanges d’informations à partir desquels le comportement général de la communauté se modifie en fonction du contexte. Par exemple, à l’approche de fauves prédateurs, de nombreux mammifères herbivores adoptent un dispositif de défense au sein du troupeau. Le cas des hyménoptères sociaux, tels que les fourmis est encore plus significatif. La découverte d’une source de nourriture abondante est rapidement transmise par signaux chimiques d’individu à individu, au sein de la fourmilière, laquelle organise rapidement un système d’approvisionnement comportant localisation, trajet, transport et stockage, et ce, à partir d’un potentiel neuronal extrêmement faible. Les exemples de ce type sont innombrables et constituent par leur masse une démonstration par l’exemple de l’importance vitale de la perception de son environnement pour la survie et le développement.

... Qui s'étiole souvent sous l'effet de la routine et de la propension de nombre d'organisations à être autocentrées

En ce qui concerne les organisations humaines, et en particulier les entreprises, le CREPA de l’Université Paris Dauphine, dans son cahier de recherche n° 44 ( Michel Kalika, Florence Laval, Véronique Guilloux), distingue 3 modes d’appréhension de l’environnement par les entreprises : 
  • la conception objective, qui considère l’environnement comme une réalité concrète externe à l’organisation, mais déterminant pour sa structure, 
  • la conception perceptive, qui considère également l’environnement comme une réalité concrète externe à l’organisation, mais perçu au travers des filtres cognitifs des managers, lesquels introduisent des biais (7 biais cognitifs ayant une influence sur la perception de l’environnement et les décisions stratégiques sont ainsi recensés par Laroche et Nioche à partir des travaux de Schwenk (1994)),
  • la conception constructive, qui réfute la séparation entre l’entreprise et son environnement, lequel est considéré comme le double résultat des constructions mentales des managers et de leurs actions.
et établit, dans le même temps, une relative corrélation entre la perception de l’environnement, et en particulier des menaces qu’il recèle, et la structure de l’organisation de l’entreprise. 
Une forte structuration de l’organisation de l’entreprise semblant correspondre à une perception de menace relativement faible, et inversement. 


Ceci nous rappelle que percevoir son environnement n’a de sens que si l’on a la capacité à se percevoir soi-même au sein de cet environnement, à s’y mettre en perspective, distinguant ainsi nos caractéristiques, forces et faiblesses, menaces et opportunités, antagonismes, symbioses, éléments neutres. Tout individu ou organisation doit donc se considérer comme partie intégrante de son environnement, sous peine de désorientation.

Je postulerai, pour ma part, que les conceptions objective, perceptive et constructive d’appréhension de l’environnement, ne sont pas exclusives les unes des autres, mais s’entremêlent constamment, le poids relatifs de chacune de ces conceptions variant selon l’observateur et le sujet observé.

L’importance vitale de la perception de l’environnement pose, bien-sûr, en premier lieu, la question des moyens ou techniques de perception de cet environnement. La perception implique :
  • La collecte d’informations, objectives et subjectives, car comme nous l’avons vu, le rôle des filtres cognitifs n’est pas neutre,
  • Le discernement dans le recueil et l’exploitation de cette information.
  • La compréhension et la modélisation de l’environnement à partir des informations recueillies et qualifiées.
Le discernement porte notamment sur :
  • la sélection des informations pertinentes pour l’entreprise,
  • la qualification de la valeur de l’information, au regard :
    • des moyens et modalités d’acquisition de cette information (s’agit-il d’une mesure et comment a-t-elle été effectuée ?, d’une estimation, d’une information institutionnelle ?, d’une rumeur ?, d’une croyance ?, d’un dogme ?, d’une intuition ?, d’une opinion ?, ...)
    • de son degré d’objectivité (est-ce une grandeur vérifiable ?, l’information peut-elle être recoupée ?, est-elle complète, ou nécessite-t-elle d’autres éléments pour être comprise ou interprétée ?),
    • de la façon dont elle susceptible d’être appréhendée par les filtres cognitifs des collecteurs de l’information et de ses destinataires (information attendue ou non ?, rassurante ou inquiétante ?, profitable à tel ou tel clan ou individu ?, ...)

Analyser / Evaluer chaque situation pour comprendre, prévoir et anticiper

L'analyse et l'évaluation font partie intégrante des tâches et compétences qu’exige le rôle de manager. Un manager mène des actions réfléchies, tant aux plans stratégique, que tactique et opérationnel, ce qui implique une maîtrise du temps permettant de ne pas subir les événements.
Cette réflexion porte sur l’ensemble des aspects de la mission du manager. Elle a pour objet d’assurer :
  • Le discernement mentionné ci-dessus,
  • L’analyse des informations ‘discernées’ (ayant fait l’objet de ces efforts de discernement) afin d’assurer la compréhension et d’être en mesure de préparer l’élaboration de l’action (stratégique, tactique ou opérationnelle).
Elle débouche sur une modélisation, formalisée ou non, de l’environnement interne et externe, au sein d’un espace-temps définit, et sur la définition d’un dessein, d’ordre politique, au service duquel se placeront l’organisation et la stratégie.

L’analyse nécessite le recours à un ensemble d’aptitudes et de méthodologies telles que :
  • L’ajustement efficace des modalités d’analyse au niveau de complexité de l’objet de l’analyse (le simple doit être traité par la simplicité, le compliqué par l’expertise, et le complexe par la complexité, points sur lesquels nous reviendront),
  • La mise en relation des environnements internes et externes,
  • Le zoom alternatif et répété du global au particulier et du particulier au global,
  • La multiplication des angles de vue,
  • Une mise en perspective dans l’espace-temps (espace géographique ou conceptuel tels que des secteurs d’activité, lecture comparée du présent à la lumière du passé et à la lumière de l’avenir),
  • La prise en compte des filtres cognitifs,
  • Le dépistage de corrélations,
  • L’exercice de l’interprétation,
  • La conception de scénarios, ....

vendredi 30 mai 2014

Introduction aux principes du capital informationnel

Capital Informationnel

Le capital informationnel de l’entreprise joue un rôle majeur et croissant, tout comme le capital humain.


1. L’importance du capital informationnel :


L’information est aujourd’hui reconnue comme un capital immatériel de l’entreprise et de toute organisation, indispensable au bon fonctionnement de l’organisation, substrat de la stratégie, de la performance, de la réactivité, et de la capacité à aborder les défis en cours et à venir.

« L’information est clairement le nouveau carburant des échanges économiques », rappellait le rapport de la commission sur l’économie de l’immatériel réalisé par Maurice Lévy et Jean-Pierre Jouyet en 2006.

2. Ce capital doit permettre de relever les défis suivants :

2.1. Le défi de la réactivité

L’agilité et la réactivité nécessitent une connaissance et une compréhension approfondie de l’entreprise au sein de son environnement, sur un champ très étendu, notamment celui du contexte et des opérations en cours. 

La fraîcheur de l’information y joue un rôle essentiel. Le partage et l’échange d’information doivent donc se rapprocher au mieux de l’instantanéité. Par exemple, une offre, faxée du bout du monde, d’un volume élevé de matière première disponible à un cours rentable, doit atteindre le décideur approprié dans un délai qui lui permette d’agir immédiatement et efficacement sur l’ensemble de la chaîne logistique, pour être en mesure d’en tirer parti. Dans un tel exemple, le temps est plus que jamais de l’argent. Hors la maîtrise du temps passe prioritairement par la maîtrise de l’information. 

Les organisations tendent aujourd’hui à déléguer toujours davantage aux collaborateurs, afin que ces derniers puissent accroître leur autonomie, améliorant ainsi la réactivité globale de l’entreprise. Les systèmes d’information constituent pour ces collaborateurs des outils précieux dans l’acquisition de cette autonomie en leur fournissant toujours plus d’information ciblée, fraîche et contextuelle, ainsi que des supports d’analyse. 

La Business Intelligence se démocratise et se met de plus en plus au service des responsables intermédiaires et des opérationnels.

2.2. Le défi de l’efficacité collective

L’accroissement de la capacité d’innovation, de l’agilité ou de la réactivité, ainsi que la performance commerciale passe par la démultiplication des modes d’interaction de l’entreprise avec son environnement, et par la démultiplication d’interactions efficaces au sein de l’entreprise. Cette démultiplication s’appuie sur l’implication de l’ensemble des collaborateurs de l’entreprise. Les modes et qualités de ces interactions dépendent de l’organisation, des qualités personnelles et professionnelles de chacun, mais aussi de la connaissance sur laquelle elles s’appuient, de la qualité de l’information disponible, de l’accès et du partage et d’une compréhension commune de cette information. 

Le développement de l’efficacité et de la créativité collective s’appuie donc largement sur le partage d’information. Ce partage suppose, de la part des collaborateurs et de l’organisation, la capacité à franchir les frontières entres chapelles, tant pour diffuser de l’information que pour en recueillir, notamment par l’application du principe selon lequel toute action de l’un doit être connue de ceux qui peuvent s’en trouver impactés. 

La performance commerciale, par exemple, nécessite de la part des collaborateurs une connaissance étendue de l’entreprise, de sa culture et de son organisation, de ses produits et services, de ses succès et références, ainsi qu’une bonne connaissance du marché et du client. Cette connaissance n’est pas portée par un seul collaborateur, ni de façon exhaustive par aucun d’eux, elle est disponible pour chacun à condition que les informations  portant cette connaissance soient diffusées, échangées, partagées, et rendues disponible à ceux qui en ont besoin. Cela suppose la mise à disposition de l’information par tous ceux qui en détienne, et une indexation de cette information selon les différents axes d’emploi possibles ou univers d’usage (organisation, secteur, métier, offre, technologie, …). 

Les entreprises les plus performantes échangent entre elles leurs meilleures pratiques dans le cadre de cercles de qualité et de clubs de réflexion (ex : le CIGREF), et élaborent des stratégies de partenariats ciblés avec leurs homologues, clients, sous-traitants, concurrents. Elles font circuler et partagent de l’information au sein de leur éco système, par exemple au sein de la communauté des clients (ex : réseau social marketing et communauté de clients en ligne).

2.3. Le défi de l’innovation

Toute idée neuve a besoin d’être confrontée à de multiples avis et expériences pour être précisée, testée, validée. De même, la simple mise en relation de constats, d’expériences ou d’attentes partagées ou complémentaires peuvent déboucher sur de l’innovation.

L’innovation naît également du rebond sur une information nouvelle, d’un échange qui suscite la réflexion, ce qui implique d’être à l’écoute de la nouveauté, des tendances, des innovations en cours, et des attentes visibles ou non visibles du marché, mais aussi d’un véritable travail de R&D basé sur la compréhension de l’information. L’identification des attentes non visibles du marché, productrices de signaux faibles, constitue un enjeu de compétitivité fort dans la compétition économique. Etre le plus en phase avec le marché est une course constante.

2.4. Le défi de l’anticipation (défi de la complexité et d’un environnement incertain)

Ce qui est vrai pour la réactivité opérationnelle, l’est aussi pour l’anticipation stratégique.
...
réactivité, efficacité collective, innovation, anticipation





Christophe Hénocq

vendredi 9 avril 2010